Mon cérificateur solaire : plan et première utilisation
Publié le 21 Décembre 2014
Depuis ma découverte de l'apiculture dans le Boundou, je rêvais de construire un cérificateur solaire pour extraire la cire des rayons une fois le miel extrait. Il existe plusieurs méthode pour extraire la cire, mais le cérificateur solaire me paraissait le meilleur outil compte tenu de la présence quotidienne du soleil (oui oui, j'ai bien dit quotidienne... je sens que je viens de me faire des ennemis...). Lorsque j'ai commandé mes propres ruches à mon menuisier, j'en ai donc profité pour réaliser le prototype que je vous présente aujourd'hui. La machine était tellement belle que je n'ai pas osé la sortir pendant la saison des pluies et que j'ai attendu la récolte de novembre pour la tester officiellement.
Tout d'abord un petit mot sur la cire au Sénégal. Traditionnellement, la cire est peu valorisée, pas méconnaissance des techniques d'extraction et de son utilisation. La plupart du temps elle est donc jetée. Certains l'utilisent tout de même pour colmater des trous (dans les machines agricoles, dans les bassines d'eau...), et les femmes la connaissent pour fabriquer leurs boucles d'oreilles. Dans ce cas, les apiculteurs extraient la cire de manière brutale, en jetant les restes de rayons sur le feu... je ne sais pas trop comment, mais le résultat est vous l'imaginez catastrophique ! J'ai moi-même été victime de cette infamie lorsque je commandai 20kg de soi-disant "belle cire" à Kolda... j'ai tout essayé pour la rattraper, en vain, elle sentait le brûlé à des kilomètres !
Une manière plus douce d'extraire la cire est de la placer dans un linge style moustiquaire, puis de la plonger dans de l'eau bouillante. La cire fond avec la chaleur et passe à travers le linge, tandis que les impuretés restent enfermées. Une fois le processus terminé, on laisse le tout refroidir : la cire remonte à la surface (elle est moins dense que l'eau et ne se mélange pas à elle car c'est un corps gras) et se fige en refroidissant. Il suffit de récupérer la couche de cire superficielle. J'ai testé cette méthode, en petite quantité et avec du matériel de cuisine, mais elle gaspille beaucoup d'énergie (bois ou gaz pour la marmite) pour un faible rendement.
Le cérificateur solaire a le gros avantage de ne marcher qu'avec l'énergie solaire, et d'être une machine très simple à réaliser. On peut le construire de différentes manières, selon l'imagination de chacun, et avec différents matériaux, de recyclage ou non. Tapez "cérificateur solaire" ou "bee wax melter" sur google image, vous aurez un aperçu des modèles possibles. Comme je ne suis pas une bricoleuse chevronnée et que j'aime le travail bien fait, j'ai choisi de réaliser mon cérificateur selon le plan classique trouvé sur internet ( http://www.beesource.com/files/solmeltr.pdf). Le plan n'est pas si simple à déchiffrer, notamment au niveau du bac intérieur et du nombre de planches en bois. J'ai fait une version du plan transcrite en cm, que je peux vous fournir au besoin (demandez-moi pas mail). Voici donc mon interprétation personnelle du plan de Beesource.com, réalisée par mon menuisier Mamadou Diakhité.
Quelques détails et conseils concernant la construction, adaptée aux pays chauds :
- Le bois utilisé est le dimb (Cordyla pinnata), comme pour les ruches. Mêmes avantages et mêmes défauts : très résistant aux attaques de termites, durable, très esthétique, mais lourd le diable !
- Le bois est uniquement huilé, avec mon mélange maison cire d'abeille/huile de soja. Ce traitement permet de nettoyer l'appareil plus facilement, notamment l'intérieur si la cire et le miel coulent en dehors du bac. Inutile de peindre en noir au Sénégal, la chaleur est suffisante et les multicouches de bois permettent de conserver la chaleur.
- Une simple vitre de 5mm suffit. Je la protège avec une plaque de polystyrène découpée juste à la bonne taille.
- Des crochets sur le couvercle permettent de fermer l'appareil de manière étanche. Indispensable pour éviter la perte de chaleur... mais aussi pour éviter que les abeilles ne rentrent dans la machine au risque de cuire ! Je déplacerai toutefois les crochets sur le côté, car devant ils gênent la manipulation. A part ça, un bâton pour tenir le couvercle ouvert serait le bienvenu.
- La pente est de 15°... environ. Je ne pense pas que la valeur de l'angle soit réellement importante, il suffit que la cire puisse couler naturellement du côté du bac, et pas trop vite pour ne pas drainer toutes les impuretés. En plein, hiver, lorsque le soleil est au plus bas, la pente est un peu faible en début de matinée et en fin d'après-midi, mais il suffit de mettre une cale pour rehausser le tout au besoin.
- Une trappe sur le devant, pas indispensable, mais pratique si on veut rapidement récupérer la cire en cours d'utilisation sans craindre un assaut des abeilles. En plus ça donne un certain charme à la machine je trouve ;-)
- Des roulettes à l'arrière permettent de faire tourner la machine facilement pour suivre le soleil. Il aurait été plus judicieux et mettre des petites roues (genre celles de vélo pour enfant) à l'avant et à l'arrière, afin de pouvoir rentrer et sortir la machine tout seul... malheureusement je n'ai pas trouvé mon bonheur dans les quincailleries de Tamba.
La machine m'aura coûté 30 000Fcfa, soit 45€ (sans la main d'oeuvre ni les finitions), ce qui équivaut au coût d'une ruche... un investissement raisonnable même s'il est surement possible de réaliser un cérificateur moins cher. Pour les accessoires intérieurs, j'avoue ne pas être totalement au point. J'ai utilisé une tôle en zinc, ce qui est absolument à proscrire pour traiter la cire... en plus, la tôle ondulée ne permet pas à la cire de s'écouler correctement, les impuretés bouchant les gouttières. En fait, j'attendais d'être sure que la machine marche correctement avant d'investir dans un bac en inox. A Dakar, on trouve des feuilles d'inox pour la modique somme, parait-il, de 50 000F ! Une feuille permettrait de réaliser 2 bacs, mais tout de même, cela doublerait le prix de l'engin. J'attends donc de trouver une meilleure occasion pour finaliser le tout.
Quelques détails du cérificateur.
Je ne vous dis pas au mois d'avril, je pense qu'en 10 minutes tout aura fondu !
Bref, ma première utilisation fut un succès : une belle cire bien jaune s'écoula dans le bac de récupération, sentant délicieusement le miel. Un peu trop d'ailleurs, ce qui ne manqua pas d'appâter toutes les abeilles du coin ! Une petite erreur toutefois : j'avais placé les rayons directement dans le cérificateur, sans les nettoyer au préalable : le miel resté prisonnier des rayons (on ne peut tout extraire par pressage) s'est donc aussi écoulé avec la cire dans le bac. Miel et cire ne se mélangent pas, on récupère les deux produits facilement. Mais d'une part ce miel a chauffé et on ne peut le mettre en pot pour la vente, d'autre part son odeur imprègne la cire et on ne sent plus l'odeur de la cire elle-même. La prochaine fois, j'essaierai avec des restes de rayons lavés et séchés... d'ailleurs, l'eau miellée issue du lavage peut faire une très bonne citronnade !
Le thermomètre atteint facilement 90°C par temps voilé en plein hiver... pas chez tout le monde, je l'entends bien ! ;-)