Et 2 ans après... bilan 2015
Publié le 25 Janvier 2016
Voilà un petit moment que je n'ai pas publié d'article, comme me l'ont fait remarquer certains de mes lecteurs les plus assidus. Rassurez-vous, tout va bien, juste un peu bousculée entre plusieurs missions, récoltes et visites. Mais je ne m'en plains pas, au contraire ! Je profite donc d'une petite semaine à Tambacounda pour renouer avec la civilisation (Internet et glace à la banane) et vous offrir ce long article en guise de bilan de l'année 2015.
Kourientine
Ma petite chambre, digne de celle de Koussan, et Jadis celle de Katané... Ne vous fiez pas aux apparences, on y est très bien quand les rats ne viennent pas faire la java toute la nuit !
La maison des invités à Kourientine. Pas sûre qu'elle tienne debout encore longtemps, mais en attendant ça dépanne bien !
Sinon que dire d'autre sur la vie au village. Que j'y suis toujours aussi bien accueillie, qu'on m'y nourrit et qu'on m'y héberge gratuitement, que les enfants y sont bien mieux éduqués qu'à Tamba, que les jeunes écoutent la musique tous les soirs sur la place du village, qu'on y entend les babouins aboyer la nuit, qu'on y mange du poisson tous les jours, que tout le monde sourit tout le temps, que chacun vaque à ses activités sans se plaindre, que personne ne réclame rien à personne, qu'on s'entre-aide et que l'argent n'est pas au coeur de toutes les préoccupations... Que demander de plus ?
Moussa, mon associé
Vous l'aurez surement constaté dans mes articles précédents, Moussa m'accompagne maintenant dans toutes mes activités au village. Moussa Konaté est à la fois le neveu et le du chef du village. Il a 37 ans, deux femmes, 10 enfants et 1 petit-fils (ne vous inquiétez pas, l'arbre généalogique de la famille est en cours de finalisation). Il est pêcheur, agriculteur, guide de chasse au campement de Gouloumbou, et depuis quelques temps, apiculteur.
Lors de mon arrivée au village, le chef Djambala, grand amateur de miel, avait dit à Moussa de tout faire pour apprendre l'apiculture à mes côtés. Moussa avait alors peur des abeilles mais sa curiosité naturelle l'emporta. Au fil des mois, nous avons donc formé une équipe et partagé nos savoirs respectifs. Entre deux visites au rucher, Moussa me fit découvrir la pêche. A chaque fois que je voulais faire quelque chose Moussa était là pour m'aider : défricher, nettoyer, surveiller...
Après tout ce temps, Moussa est devenu un vrai ami, et plus encore, un équipier. C'est donc tout naturellement que nous avons décidé de partager équitablement nos récoltes de miel, issues de mes ruches comme des siennes. 50-50, moins une petite contribution pour Djambala évidemment. Il reste maintenant à formaliser tout cela et à réfléchir aux autres activités que nous pourrions mener ensemble (sorties ornitho, pêche, maraîchage...).
L'apiculture
En un an, 15 de mes ruches se sont peuplées de manière naturelle, auxquelles il faut rajouter les 8 ruches de Moussa. Soit au total 23 ruches que nous gérons à deux. Wahou, je m'impressionne moi-même ;-) Certes, il nous reste à peupler une dizaine de ruches, et la plupart des colonies sont encore trop petites pour être divisée ou récoltée, mais cela commence à prendre forme. Nous avons pu récolter 10 kg de miel en décembre, et la saison sèche s'annonce très bonne.
Moussa et moi apprenons au fur et à mesure les spécificités de l'apiculture près du fleuve : cycle des abeilles, plantes mellifères, périodes de miellées, ravageurs... Parfois avec de bonnes surprises (très bons peuplement des Warré en hauteur dans les arbres) et parfois de mauvaises (invasion de petits coléoptères dans toutes les colonies...).
Dans l'ordre : une ruche kenyane, une ruche Warré et une ruche Langstroth.
Les plantations
Cet été, je m'étais mise en tête de tester sur mon terrain le semis direct de jujubier, de moringa et de quelques arbres fruitiers. Après tout, je n'avais rien à perdre ! Pendant les mois qui suivirent, je pus admirer mes petits plants pousser, notamment les moringa dont le taux de germination approcha les 100% ! Quelques jujubiers, 3 avocatiers, et surtout une dizaine de jeunes fromagers menacés d'inondation, que Moussa eut l'idée de transplanter depuis la forêt galerie.
Tout était magnifique jusqu'à ce que... l'Hyptis ne décide d'investir les lieux et d'envahir tout le terrain ! Pas de panique, les jeunes plants doivent toujours être là, mais impossible de les retrouver au milieu des herbes sèches de 2m de haut. J'ai bien essayé d'y aller une fois, mais j'en suis ressortie asphyxiée de poussière, pleine de graines et de griffures... Il faudra donc avoir le courage de défricher les alentours pour y voir plus clair, avant que les vaches ne se décident à venir piétiner le terrain !
Sinon au village, quelques expérimentations sont en cours. La bonne surprise de la fin d'hivernage fut de trouver une énorme pastèque juste devant ma porte, qui avait poussé à partir de graines jetées négligemment. Un vrai délice ! Et dans le grand jardin de Moussa, nous expérimentons toutes les semences que nous avons sous la main... y compris le fameux chou de Magnat du Limousin généreusement offert par Michelle et Jean-Marie. Pour le moment, pas encore de design permacole, pas encore de buttes ni de baissières, mais je commence à sensibiliser sur le paillage, l'ombrage par les arbres et les fleurs qui repoussent les insectes...
La pastèque qui a poussé toute seule... la meilleure du monde !
Premier essai de jardin chez Moussa, sous les manguiers. Moi je sème des salades et Maman des oeillets d'Inde.
Les cosmétiques
Outre les expériences maraîchères, je me suis aussi amusée à fabriquer savons, baumes et divers cosmétiques. A partir de beurre de karité, d'huile de coco fait maison, de cire et de miel. J'ai même investi dans une petite presse à huile végétale, la presse Piteba, avec laquelle je compte bien tester toutes les graines qui me passent sous la main. Il s'agit d'une petite activité annexe qui m'occupe bien pendant mes longues journées solitaires dans la chaleur de Tambacounda !
Les missions
Comme l'année dernière, j'ai pu réaliser quelques missions de consultance qui, je ne le cache pas, m'ont permis de gagner un peu d'argent. Pas une fortune, mais de quoi manger au quotidien et à avoir un semblant d'autonomie... sachant que sans l'appui complémentaire de mes parents, de mes parrains/marraines et des villageois de Kourientine, rien de tout cela ne serait possible évidemment. J'ai donc poursuivis plusieurs missions dans la RNC du Boundou, notamment un suivi écologique des grands mammifères de la réserve et un suivi du fonds d'appui aux initiatives économiques. La bonne surprise fut de décrocher ma première formation apicole en Mauritanie, avec l'ONG Nature Mauritanie. J'espère qu'elle me permettra de continuer les formations dans le cadre d'autres projets, car cette expérience était très intéressante et motivante pour l'avenir de l'apiculture en Afrique.
Transects dans la RNC du Boundou : identification des empreintes des grands mammifères avec mon empreintoscope.
Les Visites
Cette année, j'ai pu faire visiter mon terrain à quelques uns de mes parrains et marraines. Car ne l'oubliez pas, vous êtes tous invités à venir me voir à Kourientine, que ce soit pour un pique-nique au bord du fleuve, une petite balade ornitho ou bien une semaine intensive de défrichage du terrain. Je dispose maintenant de 3 vélos et 3 lits pico, ainsi qu'une chambre d'ami au village, qui me permettent de vous accueillir dans des conditions pittoresques et originales !
Mes courageux visiteurs de l'année sont donc :
Mon menuisier Diakhité, parrain de ma première ruche Warré venu m'aider à installer des ruches pendant l'hivernage.
Jean-Marie, venu m'apporter le fameux broyeur à miel et donner quelques leçons de jardinage à Moussa ;-)
Jean-Jacques, ornithologue et un de mes premiers parrains, de passage pour expérimenter la balade ornitho en pirogue en compagnie de deux amis espagnols (trop trop dur comme boulot)
Maman et Pierre, mes premiers wwoofer, venus passer 1 semaine à Kourientine, avec au programme : jardinage, récolte de luffa, test de balade en vélo et en pirogue, réalisation de l'arbre généalogique de la famille Konaté, observation des babouins... et j'en passe !
Les projets 2016
En parallèle, je devrai mener une petite étude de faisabilité concernant la future maison, que j'aimerais faire avec la technique de la voûte nubienne (je vous en parlerai plus en détail un peu plus tard). Si tout va bien, les premières constructions pourraient commencer en 2017... inch allah !
Je vous laisse en espérant partager avec vous cette année encore plein d'aventures sénégalaises...