Mes cases traditionnelles 1 : les murs en banco
Publié le 10 Juin 2016
Vivre dans une case en Afrique... C'était mon rêve il y a de nombreuses années. Mais malgré mes presque 10 ans de Sénégal, je n'avais encore jamais eu ma case à moi, ni vécu en brousse en permanence. Pourtant, on ne peut pas dire que c'était la vie trépidante de Tambacounda qui me retenait ! Juste le fait que tout prend du temps ici, BEAUCOUP de temps, même pour des choses simples... enfin qui paraissent simples !
Comme vous le savez, j'ai acquis depuis 2 ans un terrain près du village de Kourientine, au bord du fleuve Gambie. J'y ai installé mes première ruches, commencé un peu de jardinage, planté quelques arbres... J'ai aussi commencé mon intégration au village en logeant dans une petite chambre temporaire prêtée par le chef du village. Bien que mon projet avance, il avance lentement, et d'autant plus que je ne suis pas à Kourientine en permanence.
En janvier dernier, losque j'ai accueilli Maman et Pierre, au village , il nous est apparu que la seule manière de progresser dans mon installation serait de quitter totalement mon appartement à Tamba (sans regret, si ce n'est l'approvisionnement en fruits et internet haut débit) et de loger en permanence au village. Etant seule pour le moment, je ne pouvais pas risquer de construire quelques cases sur mon terrain éloigné : le chef Djambala n'aurait pas été rassuré de savoir une jeune toubab toute seule en brousse entourée de vipères, d'hippopotames et de trafiquants de sucres gambiens à vélo ! Il me prêta donc un bout de terre à côté de sa maison, pour que je puisse y construire quelques cases.
Nous décidâmes donc, avec Djambala, Moussa, Maman, Pierre et moi (oui ça fait plus sérieux quand on est une délégation familiale) de construire 3 cases traditionnelles au village, le temps nécessaire à la réalisation du désign permacole de mon terrain. J'aurais donc 1 chambre, 1 atelier pour travailler, et 1 bureau/chambre d'amis, qui me permettraient enfin de vous accueillir dignement (mais rustiquement) dans mon petit paradis. Elle est pas belle la vie ?
Alors comme beaucoup se demandent comment sont construites les cases en Afrique, je vous ai préparé un reportage photo détaillé, vous montrant toutes les étapes de la construction, avec toutes les petites astuces que j'ai pu glaner à droite et à gauche. Bien sûr, il existe plusieurs types de cases (rondes ou carrées), de techniques de construction (boules ou briques), de charpentes, de toitures... tout cela dépendant des matériaux locaux et de l'inventivité des différentes ethnies. Malheureusement, les produits modernes (ciments, tôles) sont presque entrés dans la tradition, et les savoirs ancestraux se perdent...
Ces cases, je les ai voulues aussi naturelles et traditionnelles que possible, tout en étant confortables. J'ai donc fais appel à Moussa comme chef de chantier et aux autres villageois en fonction de leur savoir-faire.
Petit bout de terrain au village, que le chef m'a prêté pour construire mes petites cases et rester au village. A 100m du fleuve, avec vue sur les palmiers, qui dit mieux ?
Au village, les briques sont toutes réalisées au même endroit, tout près du fleuve... ce qui crée des cratères surement visibles sur google earth ! Cherche bien Jean-Guy !
Le briques en banco sont réalisées à partir de terre crue malaxée avec de la paille et de l'eau, puis sont séchées au soleil plusieurs semaines. Pour une case de 4x4m, nous avons utilisé 550 briques de 40x15x15cm.
1800 briques transportées à raison de 35 briques par charrette... Oui oui, on a bien fait 50 trajets !
Les briques sont déposées autour de chaque future case et sont remises en colonne style Jenga. Le niveau à bulle est prêt, quelque chose me dit qu'on en aura besoin...
Tracé des fondations avec la participation du chef Djambala, qui s'assure que l'on place bien les cases comme il faut. Nous avons tracé des cases carrées de 4m (dimension intérieure).
Pendant ce temps, Moussa prépare le mortier qui servira à coller les briques les unes aux autres. Il s'agit cette fois uniquement de terre et d'eau, bien malaxées. Je ne vous dis pas le nombre de bassines d'eau que les femmes nous ont apportées pour faire ce travail !
La terre est ensuite transportée à dos d'enfants... non non, je n'ai pas honte, ils sont volontaires et heureux de le faire ;-)
Une fois les deux briques de chaque angle bien orientées, la ficelle est tendue aux 4 angles et permet de bien positionner le reste des briques.
Baketi comble l'espace entre les briques avec le mortier avant de monter une nouvelle rangée de briques.
Et ainsi de suite, les rangées de briques montent... et la ficelle est déplacée à chaque étage pour s'assurer de rester droit.
A partir d'une certaine hauteur, il faut laisser le mur sécher avant de rajouter des rangées de briques supplémentaires. C'est pourquoi Baketi commence la case d'à côté en attendant que la première sèche.
Les murs font 2m de haut, un maximum si l'on place une toiture en paille classique, car au-delà la prise au vent serait trop grande.
Il reste cependant à caler les portes et fenêtres... pas sûre que le palmier tiendra dans la fenêtre, dommage !
Le but du jeu consiste à placer les portes et à les caler de telle sorte qu'elles soient les plus droites possibles.
Idem pour la planche du haut. Penser à faire une planche suffisamment longues et épaisse (3cm) pour une meilleure solidité.
Il reste maintenant à enduire les murs avec un mélange de terre crue et de bouses de vaches (ou crottin d'âne) malaxées avec de l'eau.
Petit erreur de débutant : les enfants avaient commencé à utliser de la terre rouge pour faire l'enduit... alors que cette dernière craquelle facilement. Baketi a repris les choses en main en utlisant de la terre grise. Ne me demandez pas en quoi elle diffère, je n'en ai aucune idée ! Une histoire de proportion d'argile et de limon je suppose...