Mes cases traditionnelles 3 : le toit Bassari
Publié le 12 Juin 2016
Après la construction des murs en banco et de la charpente en rônier, voici le dernier volet de la construction des cases : le toit en paille de type "Bassari". Les Bassaris sont une des ethnies minoritaires au Sénégal. Ils vivent principalement sur les plateaux au Sud du pays, dans la région de Kédougou, et sont aujourd'hui majoritairement catholiques. Ils sont reconnus pour leur art du tressage de la paille et leur toit de très bonne facture.
Alors que les autres ethnies construisent généralement leur toit en posant des tas de paille en vrac sur la charpente, grossièrement attachés par des lanières, les Bassaris passent des heures et des heures à tresser et peigner préalablement la paille. Pour un rendu esthétique et une solidité bien meilleurs, cela va sans dire ! Un toit Bassari peut ainsi rester étanche pendant plusieurs années.
A Kourientine, deux familles Bassaris se sont installées il y a quelques années, afin de travailler dans les plantations de bananes proches du village. Parmi eux, Bindia, un grand ami du Moussa, a bien voulu prendre le temps de confectionner les toits de mes 3 cases, malgré l'approche imminente de l'hivernage. Comme le temps pressait et que Bindia ne pouvait pas rester seul à tresser la paille, Moussa et moi sommes devenus ses petits apprentis. Une toubab apprentie qui tresse la paille comme un pauvre, vous pensez bien que j'étais encore plus l'attraction du village ! Pourtant, c'est une activité agréable pour faire passer le temps l'après-midi quand il fait 45°C à l'ombre...
Vous l'avez compris, tout le secret du toit Bassari est de préparer des bottes de paille bien tressées. Pour cela, il vous faut BEAUCOUP de paille, et de la BONNE paille. Plusieurs espèces d'herbacées peuvent être utilisées, en fonction de l'environnement. Les tiges doivent être assez larges mais pas trop... au risque que si une grosse tige se casse, elle laisse entrer l'eau.
Pour chaque case nous avons dû tresser 42 bottes de 6m. En tout nous avons eu besoin :
- de 150 gros ballots de paille (le nombre est difficile à estimer car tout dépend de la taille des ballots et de la qualité de l'herbe)
- de 5 gros rouleaux de fil de fer noir épais
- de 25 petits rouleaux fil de fer blanc fin
- et de beaucoup de patience !
Voici le plan de travail : le fil de fer noir épais est tendu entre deux piquets placés à 6m l'un de l'autre. La paille est ensuite posée sur le fil, prête à être tressée. Une fois la botte tressée, on peut tendre un 2e fil au dessus et tresser une nouvelle botte, puis une 3e, etc...
Pour ce faire il vous faut du fil de fer blanc, préalablement enroulé autour d'un petit morceau de bois.
Il existe plusieurs façons de tresser. Celle que m'a appris Bindia est la suivante : Prendre deux petits tas de paille (plus ils sont petits et plus le rendu sera joli)...
Passer la bobine derrière le deuxième tas, à droite et sous le fil noir, puis faites-la ressortir entre les deux tas à gauche, mais sous le fil blanc.
Replier la paille mouillée sur la partie attachée. Cela forme un trou dans lequel sera inséré le morceau de bois. Réserver pour plus tard...
Les bottes sont donc jetées sur le toit, puis déroulées les unes par dessus les autres, en faisant le tour du toit. Elles sont attachées entre elles et au toit par du fil de fer noir.
Petite astuce de pêcheur inventée par Moussa : placer un vieux filet de pêche sur la charpente avant de poser le paille. Ainsi, la paille ne s'affaissera pas à l'intérieur. Pas bête...
PS : Bindia m'a promis une danse Bassari spéciale pour la fin du 3e toit, j'ai hâte de voir ça !