Le distillateur est arrivé !
Publié le 31 Mars 2018
Il y a 6 mois, nous avions fait appel à vous pour nous aider à acquérir un hydro-distillateur afin de tester la production d’huiles essentielles dans mon village. Une cagnotte fut organisée sur le site Leechi (voir l’article présentant le projet) avec l’aide de mes amis Belges Yves, Isabelle et Erena. Cette campagne de financement participatif nous permit de collecter près de 800€ grâce à 20 contributeurs, représentant le prix de l’hydro-distillateur et du petit matériel. La machine fut vite commandée, mais il nous fallut attendre un peu avant de pouvoir la transporter dans de bonnes conditions.
L'hydro-distillateur que nous avons choisi est le modèle de 30L proposé par la Verrerie Lesaint, basée à Clermont Ferrand. Le matériel est vraiment de très bonne qualité, et surtout très bien protégé pour le transport (caissette en plastique renforcé avec mousse).
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Verrerie Lesaint, Fabrication de verreries de laboratoire - Accueil - www.verrerielabolesaint.com
La Verrerie Lesaint, fabrication de verreries de laboratoire et Kit Huiles Essentielles.
http://www.verrerielabolesaint.com/verrerie_labo_lesaint.php
Finalement, c’est Isabelle qui accepta d’affronter les 40° du mois de Mars pour nous livrer à domicile le fameux hydro-distillateur. L’objectif de sa mission était également de nous aider réaliser les premières distillations tests et de mobiliser les villageois sur ce nouveau projet. Isabelle séjourna donc pendant 2 semaines dans ma nouvelle case des invités, toute nouvellement équipée. Elle m’aida aussi bien dans mes activités professionnelles que dans mes tâches ménagères quotidiennes. Un grand merci à toi Isabelle, pour ta compagnie et ta capacité d’adaptation ;-) !
Très beau matériel de très bonne qualité, on est tout content !
Nos premiers essais de distillation concernèrent deux plantes aromatiques que j’avais soigneusement entretenues au jardin en attendant l’arrivée du distillateur : la menthe poivrée et le basilic africain. Je n’avais malheureusement pas assez de matériel végétal à cette saison pour remplir la cuve, mais suffisamment pour tester la machine.
La première étape fut donc de collecter les plantes, de les rincer (poussière oblige), et de les faire pré-faner sur une toile moustiquaire. Il est en effet recommandé de faire sécher les plantes quelques jours afin d’améliorer le rendement d’extraction des huiles essentielles. Cependant, en pleine saison sèche, nos plantes passèrent directement du stade mouillé au stade ultra-sec en moins de 24h !
Collecte et séchage de la menthe et du basilic
Pendant que nos plantes séchaient et embaumaient déjà délicieusement la miellerie-distillerie, il nous fallut tester l’agencement du matériel et faire fonctionner le distillateur à vide pour un premier nettoyage. Grâce aux indications précises de Yves, le matériel fut installé rapidement et sans problème.
Pour ceux qui découvriraient pour la première fois un distillateur, voici en quelques mots comment cela fonctionne. Pour ce premier article je ne rentrerai pas dans les détails, il s’agit juste une première initiation. Le principe de base est que les huiles essentielles ne se mélangent pas à l’eau (c’est bien pour cela qu’on les appelle des huiles) mais comme elles sont très volatiles, elles peuvent être extraites par la vapeur. Il nous faut donc un système tel que celui décrit ci-dessous :
- Une cocotte-minute remplie d’eau est mise à chauffer.
- La soupape d’évacuation de la vapeur est reliée par un tuyau à gaz à une cuve, dans laquelle se trouve les plantes à distiller.
- La vapeur traverse donc les plantes, emportant avec elle les huiles essentielles très volatiles, avant de ressortir par le haut de la cuve.
- La vapeur chargée des huiles essentielles traverse le triangle d'extraction en verre, puis monte dans le réfrigérant à boules.
- Une petite pompe immergée dans un grand seau d’eau fraîche est reliée au réfrigérant par deux tuyaux. L’eau fraîche traversant la double paroi du réfrigérant a pour effet d’abaisser la température et de retransformer la vapeur en liquide, avant qu’elle ne quitte le circuit.
- Le liquide retombe alors dans la partie « robinet » du triangle, et il se crée 2 phases : l’eau en bas, et l’huile essentielle au-dessus.
- Il suffit alors de tourner le robinet, de collecter tout d’abord l’eau (appelée alors hydrolat), puis doucement de récupérer l’huile essentielle dans un petit flacon.
Le processus dure entre 1h30 et 2h30 selon la quantité de plantes. Toute la subtilité de la manipulation réside dans la maîtrise des températures : chaleur de la cuve (forte mais pas trop) et fraicheur du réfrigérant. Si le feu sous la cocotte est trop fort, ou bien si l’eau du refroidisseur n’est plus assez fraîche, alors les huiles essentielles vont s’échapper par le haut. Si le feu n’est pas assez fort, les huiles ne seront pas entrainées par la vapeur, ou bien vont retomber au fond de la cuve.
Si ces explications sont un peu complexes, regardez les photos ci-dessous de notre premier essai avec le basilic.
La cuve en cours de remplissage du basilic. Il faut faire attention à ne pas trop presser les plantes, pour que la vapeur les traverse sans difficulté.
La verrerie fixée au-dessus de la cuve : le triangle en bas, et le réfrigérant à boules en haut. Les deux tuyaux sont reliés à la pompe immergée dans le seau à côté.
Les gouttelettes de liquide retombent alors directement dans le triangle, où l’on voit déjà la séparation entre l’eau (en bas) et l’huile essentielle.
Pendant la distillation, la quantité d’eau et d’huile augmente progressivement. L’eau (toujours en bas) remonte ensuite dans le trop-plein du triangle et retombe ensuite dans la cuve. Il est aussi possible de récupérer cette eau (hydrolat) pour un usage ultérieur, en la prélevant régulièrement avant qu’elle n’atteigne le haut du trop-plein.
Pour notre deuxième essai sur la menthe, Djambala, le chef du village, nous fit l’honneur d’assister à la distillation. Souvenez-vous, Djambala est tradipraticien, et il a aussi joué le rôle de « King of the Oil » dans notre bande annonce de la cagnotte. Il était tellement heureux d’apprendre l’arrivée du distillateur qu’il vint directement nous voir pour suivre toutes les étapes. Nous tâchâmes de lui expliquer le fonctionnement de la machine avec mes rudiments de Sarakolé et ses quelques mots de français. Je crois que dans l’ensemble, il a bien compris !
Nos deux essais nous permirent d'obtenir 1g de d'huile essentielle de basilic et 1,3g d'huile essentielle de menthe, à partir d'1kg de plantes fraîches. Certes, il faudra étudier quelles sont les meilleures périodes de récolte et comment mieux préparer les plantes pour la distillation. Mais le rendement restera très faible, c'est normal : les huiles essentielles sont un principe actif très puissant présent en faible quantité dans les plantes. Il faut donc une très grande quantité de plantes pour remplir une petite bouteille de 10ml ! Quand je pense à la bassine pleine de menthe que nous avons récoltée, et au petit ml d'huile essentielle qui en est ressorti... j'avoue que je prends pleinement conscience de la force d'une petite goutte d'huile essentielle ! Et je ne gaspillerai plus une seule goutte d'HE parce que je ne fais pas attention en retournant la bouteille !
Cela veut aussi dire que lorsque l'on se lance dans la production d'huiles essentielles, il faut avoir beaucoup de plantes à sa disposition. Pour les plantes cultivées, comme les aromatiques, il faut donc avoir une grand capacité d'arrosage pour que la production soit rentable. Pour les plantes sauvages, il faut s'assurer que l'on ne surexploite pas la zone. Heureusement pour nous, l'hyptis est une plante plutôt envahissante et limiter son expansion sera le bienvenu. Quoiqu'il en soit, il faudra bien réfléchir en fonction de chaque plante et voir celles que nous reservons a une utilisation familiale, et celles que nous pourrons commercialiser.
A la fin de la mission, Moussa organisa une rencontre avec les femmes du village pour leur expliquer nos nouvelles activités. Nous apportâmes le matériel (enfin le moins fragile, c’est-à-dire la cuve et la cocotte-minute) sur la place publique pour faire de jolies photos bien colorées. Puis les femmes firent retentir le tam-tam (enfin le bidon en plastique jaune défoncé) et nous firent une petite danse de remerciement autour de la cocotte-minute. C’est sûr, il ne leur en faut pas beaucoup pour mettre l’ambiance !
Les femmes et la cocotte-minute SEB (don de ma tante préférée… si on avait su un jour que cette cocotte finirait au fin fond du Sénégal !)
Et les deux toubabs y passent aussi ! Mais bon, quand on a déjà fait la danse de la pintade devant le grand Marabout de Didé, on peut bien faire la danse de la cocotte-minute devant toute la famille !
Et voilà, la mission était quasiment finie et mes carrés de menthe complètement rasés. Nous aurions pu nous arrêter là… Mais Moussa avait plus d’un tour dans son sac. Il y pensait depuis longtemps, mais c’était pour lui une bonne occasion de m’impliquer enfin avec les femmes du village.
Le soir même, à 20h passé, toutes les femmes du village (enfin non pas toutes, mais une bonne trentaine quand même) virent à la maison pour me demander de les aider à remettre sur pied leur groupement. Elles avaient effectivement créé un GIE il y a de nombreuses années mais n’avaient jamais été appuyées et avaient petit à petit laissé tomber. En voyant toutes les activités que je menais, elles se dirent qu’il était temps qu’elles aussi participent.
Elles me demandèrent donc d’être leur trésorière (pour remplacer le précédent décédé) et de leur apprendre ce que je savais faire. Ce que j’acceptais, forcément, malgré la charge que cela représente. La première activité choisie fut la fabrication de savon, que nous devrions entreprendre dans les semaines à venir…
Mais en attendant, place aux abeilles, c’est la saison de la récolte qui commence !
UN TRES GRAND MERCI
A Yves, Erena et Isabelle de l’Association « Les Amis des Savanes »
Ainsi qu’à tous les contributeurs de la cagnotte :
Laetitia GUIGUE |
Sylvie CLAPASSON |
Maya LEFEBVRE |
Béatrice CLEMENT |
Philippe REMANDET |
Nadia BOGENEZ |
Louisette LE ROUX |
Anne-Catherine MAILLEUX |
Tim VERSTRAETE |
Bertrand BRELIER |
Agathe NOTTEGHEM-GODOT |
Bernard CLEMENT |
Chris KREMPKE |
Jean-Jacques GUITARD |
Philippe et Sylvie GRIVET |
Céline AUVRAY |
Jean-Guy et Annie BAYON |
Myriam et Pierre COTTENS |
François REMANDET |
Pauline CHARRUAU |